vendredi 25 septembre 2015

Grèce, découverte d'une cité engloutie il y a 5000 ans

Grèce, découverte d'une cité engloutie il y a 5000 ans 



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sur la rive nord de la baie de Kiladha



Cet été 2015, une équipe de chercheurs grecs et suisses a découvert une ville fortifiée engloutie sur la rive nord de la baie de Kiladha, dans le Golfe de Nauplie, situé lui-même dans le golfe du Péloponnèse de la Grèce. Plus de 6000 objets ont également été mis au jour, indique Julien Beck qui dirige l'équipe de recherche, ce qui a permis de dater l'engloutissement de cette cité côtière à 3.000 ans avant JC environ, puisqu'aucun objet plus récent n'a été trouvé.

« Nous avons mis au jour une ville entière d'au moins 1,2 hectare dotée d'un important système de fortification, qui date de l'âge du bronze, du IIIe millénaire avant l'ère chrétienne », indique Julien Beck. « Cette ville est fantastique à la fois par sa taille et par sa qualité de conservation. Elle va nous forcer à reconsidérer l'histoire de la Grèce continentale du IIIe millénaire », ajoute le chercheur émerveillé.



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Ces fondations en pierre sont celles du mur de fortification d'un village préhistorique découvert dans la baie de Kiladha, en Grèce - ©Projet Baie de Kiladha

« Il semblerait que nous ayons identifié des rues parallèles, comme s'il y avait une planification urbaine des ruelles, comme si quelqu'un avait organisé la ville, ce qui serait exceptionnel pour cette époque », indique Julien Beck. Par ailleurs, les archéologues ont découvert des fortifications dont « le caractère massif est d'un genre encore inconnu en Grèce pour la période ».

Le Ministère grec de la culture explique, en outre, que les recherches ont permis d'identifier « des tronçons d'un mur de fortification extérieur, relié aux fondations d'au moins trois grandes structures en pierres (18 mètres sur 10) en forme de fer à cheval ». Des surfaces dallées, probablement des rues, ainsi que les ruines d'autres bâtiments ont également été aperçues. « A priori il s'agit d'une ville côtière qui a été immergée après un mouvement de plaques tectoniques, un fort séisme. »



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Vue en 3D du mur de fortification (1), menant à des structures en fer à cheval - ©Achraf el Kashef

Ces trois bâtiments étaient peut-être des bastions ou des tours, d'après Julien Beck. À l'intérieur de cette enceinte, se trouvent des surfaces dallées, probablement des rues, ainsi que les ruines d'autres bâtiments, plus classiques cette fois : rectangulaires, circulaires ou à abside. " Leur fonction paraît avant tout domestique : il devrait s'agir d'habitat, de lieu de stockage ou de production ", explique le directeur des fouilles. " Leur forme est caractéristique de l'Âge de Bronze grec ", précise le Ministère grec de la culture dans un communiqué.

« Je ne comprends pas pourquoi nous n'avions pas découvert ces fortifications avant car ce site est proche de la grotte de Franchthi, sur la rive nord de la baie de Kiladha dans le Golfe de Nauplie en Grèce, une zone bien connue des archéologues. D'autant que ces murs étaient très près de la côte et à seulement entre 1 et 3 mètres de fond », indique Julien Beck.

Le professeur à l'Université de Genève évoque également, « la présence de milliers de tessons de céramique, plus de 5.000 fragments de poteries et, au total, près de 6000 objets. Ces morceaux de poteries laissent supposer que la ville a été abandonnée brutalement », ajoute le chercheur. « A priori, il s'agit d'une ville côtière qui a été immergée après un mouvement de plaques tectoniques mais nous devons poursuivre nos recherches pour confirmer cette hypothèse », indique Julien Beck.

L'équipe va en effet poursuivre les investigations. L'objectif du programme de recherche, débuté en 2014, est double : découvrir cette ville mais également le plus vieux village d'Europe immergé, datant du néolithique (il y a 9000 ans) et qui pourraient bouleverser l'histoire du Vieux Continent.



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 ©Projet Baie de Kiladha



Cette datation de 4500 à 5000 ans avant aujourd'hui, d'après les indices architecturaux, est corroborée par les objets du quotidien retrouvés, par prospection, sur le fond marin : " d'un point de vue stylistique, la céramique - nous avons remonté plus de 5.000 tessons ! - est caractéristique de l'Helladique Ancien II, c'est-à-dire de la moitié du IIIe millénaire environ, dans ce que nous appelons la période du Bronze Ancien ", ajoute Julien Beck. Pour comparaison, ces vestiges seraient donc contemporains des pyramides d'Égypte (celles du plateau de Gizeh ont été construites vers 2.600 - 2.500 avant J.-C), mais également de la civilisation des Cyclades (3.200 à 2.000 avant J.-C), voire des premiers Minoens, en Crète (2.700 à 1.200 avant J.-C). Mais ils précèdent de près de mille ans la première grande civilisation du continent grec, celle des Mycéniens (1.650 à 1.100 avant J.-C). D'ailleurs, l'obsidienne (une roche volcanique), utilisée à Lambayanna pour la fabrication de lames, " vient de Mélos " selon Julien Beck, une île de l'archipel des Cyclades peuplée dès le IIIe millénaire.

« Un ensemble similaire dans cette région et pour cette même époque, reprend Julien Beck, est la ville voisine de Lerne », aussi située dans le golfe de Nauplie et rendue célèbre dans la mythologie par le combat qui y opposa une hydre et Hercule dans ce qui a constitué l’un de ses douze travaux. « Cette cité est considérée comme une référence en termes architecturaux et pour les céramiques qu’on y a trouvées, dit l’archéologue genevois. Or, si l’on compare notre découverte à cette ville phare, on doit reprendre tout le dossier… L’on considérait ­en effet que la société de l’époque avait établi une hiérarchisation, avec à Lerne un site principal et, dans les environs, des sites secondaires. Mais les constructions massives que nous avons trouvées, si grandes que nous n’avons pas encore pu en dessiner les plans, et surtout les fortifications à visées probablement militaires – il y en a trois, espacées de 50 à 60 m le long de la muraille –, nous font dire que cette hiérarchisation est à revoir

" Il devait y avoir des superstructures en briques au-dessus des fondations en pierre, détaille Julien Beck, mais les chances de retrouver de tels murs sous l'eau sont extrêmement faibles." Par ailleurs, " la taille complète de l'établissement n'est pas encore connue. Nous ne savons pas à quel point il est entouré de fortifications ", regrette-t-il. " La recherche future à Lambayanna permettra d’apporter un éclairage nouveau sur un réseau dense d’établissements côtiers de la même époque dans le golfe Argolique (Lerne, Tirynthe, Asiné) et servira à mieux comprendre le mode d’occupation, les échanges et les activités maritimes dans la préhistoire ", conclut le Ministère grec de la culture.


Le site archéologique : https://www.unige.ch/terrasubmersa/fr/



Yves Herbo : Notons bien que la recherche principale de cette équipe (et de ce magnifique bateau équipé de l'énergie solaire) a bien comme objectif de retrouver l'un des premiers villages préhistoriques européens, du néolithique (9.000 ans minimum), c'est à dire l'équivalent européen des traces préhistoriques englouties par la montée des eaux découvertes au nord de l'Afrique, de l'autre côté de la Méditerranée... un peu l'équivalent donc de l'Atlantide du grec Platon, puisque beaucoup d'auteurs l'ont daté de 9000 ans, et sur place, en Grèce...

Notons que ce n'est pas la seule cité engloutie découverte en Europe, même si c'est probablement l'une des plus anciennes à ce jour :









Yves Herbo, Sciences, Fictions, Histoires, 20, 25-09-2015

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