vendredi 24 juin 2016

L'île Malden et ses mystérieuses ruines

L'île Malden et ses mystérieuses ruines


Nasa maldenisland 1


Lorsque que Kenneth Emory met les pieds sur l'île Malden, il a à peine 27 ans, nous sommes en 1924. Jeune anthropologue américain diplômé du Dartmouth College d'Honolulu à Hawaï, il a été embauché au Bishop Museum de la même ville, qui lui a proposé un poste d'assistant ethnologue en 1920. En fait, le travail de Kenneth Emory couvre les quatre champs majeurs de l’anthropologie : l’archéologie, l’anthropologie physique, l’ethnographie et la linguistique...


Kenneth p emory vol 3 1925

Kenneth Emory  1925


Il vient de Tahiti et il y a constaté le mauvais traitement réservé aux divers monuments Polynésiens par les autorités françaises, laissés à l'abandon, après que les pasteurs protestants et les missionnaires chrétiens en aient malheureusement détruit une grande partie, faisant disparaître avec acharnement toute l'ancienne culture pré-européenne pour provoquer l'abandon des anciens dieux et traditions... La même chose a été généralisée dans toutes la Polynésie britannique, américaine, australienne ou française... 

Ce qu'il découvre sur l'île Malden le conforte dans ses études de la civilisation polynésienne et son long travail de recensement des monuments, et notamment des nombreux marae éparpillés sur de multiples îles et atolls, dont il a commencé l'étude sur Tahiti et toutes les îles de la Société (cette première étude sera publiée plus tard sous le nom de "Stone remains in the Society Islands". En fait, Emery deviendra le plus grand expert de la culture polynésienne dans les années 1950, avec toute la reconnaissance qui lui est due...


Malden island akk ruins 1

Un archéologue devant des ruines et un marea de l'île Malden (wikipedia)

En fait, il est venu sur cette île découverte officiellement seulement en 1825 parce qu'elle avait été déclarée à l'époque inhabitée... mais que les découvreurs y avaient déclaré de nombreuses ruines de temples et maisons, prouvant une antique occupation... Sur cette île envahie par les oiseaux depuis des générations, les dépôts de guano étaient tellement importants qu'une entreprise australienne l'a exploité de 1860 à 1927. Cette entreprise est encore présente donc en 1924, ce qui permet à Emery de bien distinguer l'antique du moderne... et d’emprunter le petit train qui parcourait l'île, afin d'amener le guano près de la mer pour les convois de bateaux... il est malheureusement probable que plusieurs sites aient été abîmés ou même détruits par cette entreprise employant des méthodes du 19ème siècle...


Nasa maldenisland


L'île Malden vue de satellite, les plus grosses structures (terrasses) sont visibles en haut à gauche. Le centre de l'île est très souvent inondé par des lagons de faibles profondeurs. Un lagon est parfaitement rond, on ne sait pas si c'est dû aux 3 explosions nucléaires britanniques aériennes, il ne semble pas y avoir de radioactivité sur les lieux, qui sont libres d'accès... 


Tous les écrits et descriptions de Emery sont formels : il en a conclu que ces ruines étaient les créations d'une petite population polynésienne qui avait résidé là pendant probablement plusieurs générations quelques siècles plus tôt, sans pouvoir dater à l'époque quoique ce soit. Néanmoins, on sait depuis que la plupart des îles de la Ligne et les îles de l'archipel/nation de la République des Kiribati (l’ethnie dites "des Gilbert") ont été habitées à tour de rôle il y a plus de 2000 ans (et même 500 ans avant JC à priori) (YH : des datations toutes effectuées avant les changements de calibrages du carbone 14 - à revoir probablement à la hausse question ancienneté !).


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cette gravure (encore copiée et vendue de nos jours en plusieurs exemplaires) date du Roi Louis-Phiippe (19eme siècle) et représente un monument polynésien à l'époque visible dans les îles appelées à l'époque Gilbert citées (Malden, Christmas, etc...)


Il découvre d'antiques structures en pierre, situées autour des plages, principalement celles du nord et du sud. Un total de 21 emplacements archéologiques ont été dégagés, trois d'entre eux (du côté du nord-ouest de l'île) sont plus grands que les autres (certains documents (et sites internet) parlent de pyramides, mais, d'après les images satellites (Nord-ouest de l'île), il s'agit plutôt de longues structures élevées (tumulus ?) servant de plate-formes à des maraes...). Ces plates-formes n'ont pas été excavées ni fouillées en profondeur à priori (aucune trace écrite). Ces emplacements incluent des plates-formes de temple, appelées des marae, des emplacements de maisons, et des tombes. Les comparaisons avec les structures en pierre sur des atolls de Tuamotu prouvent qu'une population entre 100 et 200 indigènes pourrait avoir construit toutes les structures de Malden. Des maraes d'un type semblable ont été trouvés à Raivavae, une des Îles Australes. Divers puits employés par ces anciens habitants sont aujourd'hui à sec, ou saumâtres. Les nombreux lagons n'ont jamais été fouillés à priori... et l'ont sait que l'eau a considérablement monté: toutes ces îles sont basses sur les eaux, et il est déjà prévu un projet de déménagement de toutes les populations de la République des Kiribati (et de leurs voisines - des milliers d'habitants donc) car ces atolls (et donc toutes ces ruines) sont appelés à disparaître avant la fin de ce siècle, engloutis par les eaux du Pacifique...


Marae raiatea 2


marae de Raivavae. Le marae consiste généralement en une surface rectangulaire pavée de pierre, de corail ou nue, dont le périmètre est bordé de pierres plus hautes ou de bois. Il est parfois accompagné d'une terrasse pavée supportant des constructions en bois. Au centre de cette surface pavée, parfois sur un côté, une pierre est parfois dressée. Les plus grands marae sont parfois accompagnés de marae secondaires, de chemins et de surfaces dallées de pierres appelées paepae. (certaines positions astronomiques ont été trouvées). Dans certaines îles (Tahiti, iles de la Société), les marae désignent une construction particulière et rituelle, parfois en forme de pyramides...


Maurea


  Il y a 265 ans, sur l'île de Mauréa dans l'archipel de Tahiti, une énorme pyramide à étages de base rectangulaire (80m x 25m) fut découverte. Cette pyramide a été détruite (ou laissée à l'abandon et le matériel réutilisé) par les autorités française... on note que, depuis, des pyramides semblables ou proches (pyramides à degrés avec ou sans temple au sommet) ont été découvertes au Cambodge, en Corée, en Indonésie et en Chine... et en Amérique centrale et latine bien sûr... 


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Ile Malden, des structures en forme de pyramides, peut-être des temples. (Mike Fay Photos, Panoramio)


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Malden ruines

Malden ruines2

Malden ruines3

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d'autres ruines et routes sur l'île Malden (Mike Fay, Megatransect, Panoramio)

Il est décrit également des routes pavées "à la polynésienne" se dirigeant vers la mer, dans le sud de l'île. La (mauvaise) route qui fait le tour de l'île est par contre une construction moderne, du 19ème siècle.

Malden route polynesienne1
Malden route polynesienne2
Malden route polynesienne3

(toutes images, versions free : Mike Fay - Panoramio)


Voici une pièce d'archives (traduite par mes soins) datant de 1934, résumant la première publication de Emery sur ces îles qu'il a visité donc en 1924.

Archéologie des îles du Pacifique équatorial. Kenneth P. Emory. (Bulletin, Bernice P. Bishop Museum, 123. 43 pp., 22 fig., 5 pls. Honolulu: Bishop Museum, 1934.)

Un chercheur, dont la vaste expérience et les études comparatives dans le domaine de archéologie polynésienne, notamment pour s'équiper et se qualifier pour accomplir sa tâche, donner un avis dans cette publication et apporter des données historiques archéologiques de toutes les possibles sources, y compris les matières recueillies personnellement, par rapport au début de l'occupation par l'homme des îles Howland, Fanning, Washington, Christmas et Malden.

Ces îles coralliennes basses de la Polynésie équatoriale, historiquement inhabitées par autre chose que divers groupes impermanents de naufragés, travailleurs contractuels, et Européens, ont longtemps été rapportées comme présentant des structures de pierre et d'autres manifestations d'habitants antérieurs.

Cependant, des rapports exacts sur ces caractéristiques précédentes, n'ont jamais été mis à disposition. L'auteur examine les rapports antérieurs à la lumière des recherches récentes, dégage attentivement les faits de la fiction, fournit une considérable masse de nouveaux détails observés, et emploie toutes ces données en comparant les premiers habitants de ces îles avec d'autres groupes ethniques polynésiens dans le but de peser les possibilités de relations culturelles.

Les résultats sont des plus intéressants. Le langi tongien très annoncé sur l'île Malden se révèle être un marae typique Raivavae qui, avec trente-cinq à quarante autres maraes plus petits et certaines questions supplémentaires sur l'importation culturelle, sert à soutenir la conclusion selon laquelle une relation culturelle étroite existait entre les anciens habitants de Malden et les premiers Polynésiens de Raivavae, îles Australes, à 1.280 miles de distance (2060 km).

D'autre part, les sites de Fanning Island, y compris une enceinte à poissons et des murs de pierre, sont fortement évocateurs d'une influence tongienne (îles Tonga).
Les îles de Howland, Washington, et Christmas portent témoignages d'anciens habitants présentant des particularités culturelles mixtes ou indéterminées. Ce travail reflète un traitement critique des faits qui démontre un penchant louable pour une précision détaillée, et des conclusions, offertes avec une raisonnable prudence, adhérant étroitement à la preuve présentée pour leur soutien.

W. C. McKern


On peut noter aussi que cette île (comme d'autres voisines), a été le lieu du premier essai thermonucléaire britannique en 1957 (Grapple 1/Short Granite), comme quoi la présence de ruines antiques n'ont pas ému non plus les autorités britanniques... ce qui ne les a pas empêchés de déclarer cette île comme étant une réserve protégée... pour les oiseaux !

Il faut noter également que, à priori, aucune fouille en sous-sol n'a jamais été effectuée sur l'île Malden, y compris au niveau des tombes antiques : en ce qui concerne la Polynésie, l'archéologie s'est souvent et longtemps contentée de fouilles de surface, les archéologues ayant mis du temps à admettre l'existence d'une réelle Histoire et des évolutions culturelles locales, et même l'ancienneté tout simplement de ces premiers habitants des îles... les Européens n'ont jamais aimé que l'on remette en question  leurs talents de "découvreurs" porteurs de la "bonne parole"... voir Christophe Colomb, qui est toujours considéré comme le "découvreur" des Amériques dans les livres d'Histoires... occidentaux... car le barbarisme de Colomb et de ses hommes est bien sûr considéré comme "moderne" et "évolué" par rapport aux "sauvages" déjà présents sur place !

Sources :
http://sitesavisiter.com/malden-malden-line-islands
https://fr.wikipedia.org/wiki/Malden_(île)
https://fr.wikipedia.org/wiki/Histoire_des_Kiribati
http://geoculture.canalblog.com/archives/2015/01/06/31264686.html
http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1525/aa.1936.38.1.02a00230/pdf
https://fr.wikipedia.org/wiki/Kenneth_Emory
https://fr.wikipedia.org/wiki/Marae
Archaeology of the Pacific Equatorial Islands, édité par James M. Andrews, Cambridge, Mass., The Museum, 1943, paru dans Studies in the Anthropology of Oceania and Asia, presented in memory of Roland Burrage Dixon Polynesian stone remains


Kiribati state

Ki line islands


Yves Herbo texte et traductions, Sciences et Fictions et Histoireshttp://herboyves.blogspot.com/, 23-06-2016

lundi 20 juin 2016

Caraibes, Montserrat : premiers pétroglyphes découverts

Caraibes, Montserrat : premiers pétroglyphes découverts
Monteserrat glyphe3

Ce sont les premiers pétroglyphes découverts sur cette petite île britannique des Caraïbes, par des randonneurs qui effectuaient une balade sur l'île antillaise de Montserrat. Les pétroglyphes - qui semblent représenter des dessins géométriques ainsi que des êtres humains - ont été creusés dans le flanc d'un rocher moussu dans les collines densément boisées du nord de l'île. Les archéologues croient qu'ils pourraient offrir des informations précieuses sur l'histoire pré-coloniale de l'île.

Des pétroglyphes ont été laissés par les peuples autochtones des Caraïbes et ont été trouvés dans toute la région, mais jusqu'à présent, aucun n'avait jamais été vu sur Montserrat ou à proximité d'Antigua.


Monteserrat glyphe2

Photograph: mhmon

Les promeneurs ont trébuché sur les sculptures lors d'une randonnée à travers les collines densément boisées de l'île en janvier, mais les responsables ont retardé l'annonce de la découverte jusqu'à ce que l'authenticité des pétroglyphes pourrait être confirmée par les scientifiques.

" Nous avons des artefacts amérindiens sur l'île, mais on n'avait pas vu de pétroglyphes ", dit Sarita Francis, directeur de la National Trust Montserrat. " Ce sont les premiers que nous connaissons, qui ont été trouvés ici."

" L'analyse initiale suggère que les pétroglyphes de Montserrat peuvent avoir entre 1.000 et 1.500 ans, a dit Francis, " bien que la datation au carbone va peindre une image plus claire de l'origine de ces images ". (YH : c'est assez surréaliste cette affirmation, car comment dater une gravure ? : la pierre en elle-même a probablement des millions d'années (ou c'est une roche volcanique et son analyse donnera la date de l'éruption !), et la mousse se renouvelle assez fréquemment : on ne voit pas ce qu'une analyse au carbone 14 pourra donner sur des gravures inorganiques !)

Monteserrat glyphe

Photograph: Montserrat National Trust

Sur les médias sociaux, les Montserratiens ont commenté sur les similitudes des pétroglyphes avec ceux qui ont été trouvés sur St Kitts, une autre île voisine. George Mentore dit que des pétroglyphes des autochtones Arawaks et d'autres preuves de sites précolombiens ont été trouvés aussi loin au nord que Cuba, Puerto Rico et Hispaniola (Haïti/St Domingue).

Francis a dit qu'elle espérait que d'autres études révéleront les messages, le cas échéant, codés dans les sculptures. " Ils ajoutent vraiment à l'histoire unique de Montserrat " dit-elle. " Sur l'histoire des peuples se trouvant sur Montserrat, à travers le temps ".

Des preuves archéologiques suggèrent que des peuples anciens ont d'abord vécu à Montserrat - aujourd'hui un territoire d'outre-mer britannique - il y a entre 2500 et 4000 ans. Les Arawaks parlent de peuplades qui habitaient l'île auparavant, mais qui sont supposés avoir libéré les lieux vers la fin des années 1400, après des raids perpétués par un autre groupe d'autochtones, les Caraïbes. (Et question datations, ces Karabs (guerriers) et ces Arawaks (peuple pacifique) proviennent probablement également à l'origine d'amérindiens très anciens du Venezuela, probablement plusieurs milliers d'années avant JC - voir les migrations d'Amériques centrale et du Sud...)

Montserrat

Woodlands beach à Montserrat, près de l'endroit où les gravures ont été découvertes. Photograph: Bob Oliver/Getty Images

Montserrat, qui a environ 16 km (10 miles) de long et 11 km de large, est devenue sous contrôle britannique en 1632. Aujourd'hui, la majorité de la population sont des descendants de l'époque coloniale, mélange des colons irlandais et des esclaves africains.

George Mentore, un anthropologue de l'université de Virginie, qui étudie les cultures autochtones des Caraïbes et de l'Amazonie a dit que des gravures similaires avaient été trouvées le long des rivières dans le nord de l'Amérique du Sud où les Arawak, et les groupes Caribs francophones, vivent aujourd'hui.

« Ce sont des déclarations évidentes de la présence humaine ", a-t-il dit. " Je pense qu'il est assez évident qu'ils sont sacrés, d'une manière ou d'une autre ".

640px photographie art arawak guadeloupe

photographie art attribué aux arawak en Guadeloupe - la ressemblance n'est pas flagrante...