Un gros impact d'astéroïde au Canada il y a des millions d'années ?
Ce rapport qui a tout de même tardé à apparaître (découverte en 2001)
laisse en plus un goût d'inachevé et d'une mise en suspension assez
décevante pour des raisons financières (comme souvent). Je ne peux
m'empêcher de faire un certain rapprochement entre cette découverte et
ses développements et celle, plus récente, de la ou des anomalies dans la Mer Baltique. En effet, même si les dimensions sont évidemment d'une autre nature et que ce cratère, nommé maintenant le Cratère Corossol,
laisse moins de choix que l'anomalie de la Baltique quant à ses
possibilités d'existence, on avance pareillement par hypothèses (ici
cratère de volcan ou cheminées, gros banc de sel ou impact météoritique)
et on étudie la géologie locale, puis on finit par prélever des
échantillons. Un échantillon remonté présente des anomalies de fusion minérales à 1600°C environ
et on pense que la thèse de la météorite tient suffisamment la route
pour publier dans deux revues scientifiques sérieuses et envisager un
carottage local. Dans la Mer Baltique, tout pareillement,
un plus grand nombre d'hypothèses ont été émises (dues à la nature et
forme de l'anomalie de 60 mètres de diamètre, sa profondeur) et des
prélèvements d'échantillons ont été effectués. Et les analyses ont
également confirmé une fusion de minerais de certaines roches à des
températures de 1300°C !! Etonnante ressemblance de cas
pourtant très différents de par leurs natures et aussi une grande
différence de traitement scientifique... pour un intérêt scientifique
pourtant tout aussi égal pour un honnête scientifique... Yves Herbo
Image du cratère situé au large de la baie de Sept-Îles, obtenue par sondages à haute résolution.
Sa profondeur maximale atteint 250 mètres, son diamètre de 4 kilomètres, ce qui témoigne de la force de l'impact.
Sa profondeur maximale atteint 250 mètres, son diamètre de 4 kilomètres, ce qui témoigne de la force de l'impact.
" Une météorite de 4,1 km de diamètre s'est écrasée tout près de Sept-Îles...
il y a plusieurs millions d'années. C'est l'explication la plus
vraisemblable à laquelle arrive un groupe de chercheurs dirigé par Patrick Lajeunesse,
professeur du Département de géographie et chercheur au Centre d'études
nordiques, qui a étudié une anomalie sous-marine découverte il y a 12
ans, en face de cette ville de la Côte-Nord du Canada.
En 2001,
lors d'une opération de cartographie de l'habitat du homard, des
employés du Service hydrographique du Canada ont repéré, au large de la
baie de Sept-Îles, à 40 mètres de profondeur, une étrange structure de forme circulaire.
"L'hypothèse d'un cratère d'impact météoritique avait été avancée, mais
ce secteur a une géologie complexe. Il pouvait aussi s'agir de cheminées de volcan ou de remontées de sel", signale Patrick Lajeunesse. Pour en avoir le cœur net, son équipe a effectué des sondages à haute résolution dans ce secteur en 2005, 2006 et 2010. Les résultats, qui seront publiés dans la revue scientifique Meteoritics and Planetary Science, plaident en faveur de la chute d'une météorite.
Le cratère qui a résulté de cette collision est plus grand que celui du Nouveau-Québec (3,4 km). Sa forme est celle d'un cercle presque parfait au centre duquel se trouve un noyau surélevé.
Il s'agit de matériaux qui ont été déplacés vers le haut à la suite de
l'impact, comme lorsqu'une goutte d'eau tombe dans un liquide, explique
le professeur Lajeunesse. De plus, le cratère présente une série de trois anneaux concentriques. "Sa morphologie et sa géométrie sont semblables à celles des cratères d'impact météoritique", résume-t-il.
On ignore encore à quel moment l'écrasement de cette météorite est survenu. "Nous savons que l'événement s'est produit il y a au moins 2,6 millions d'années, mais il pourrait remonter à aussi loin que 470 millions d'années. La météorite est sans doute tombée sur la terre ferme alors que le niveau marin était plus bas qu'aujourd'hui", avance le professeur Lajeunesse.
Un
échantillon de roche recueilli à la surface du cratère a révélé la
présence de minéraux produits par fusion à des températures dépassant
1600 degrés Celsius. "C'est le genre de température que peut
produire l'écrasement d'une météorite", précise le chercheur. Toutefois,
on ne peut écarter la possibilité que ce fragment provienne d'ailleurs
et qu'il ait été transporté sur le site par les glaciers, reconnaît-il. "Pour apporter une preuve irréfutable à la thèse du météorite, il faudrait forer le cratère et trouver des traces de fusion dans les échantillons prélevés.
Des travaux de terrain de cette nature sont toutefois très coûteux.
Avant de nous attaquer à pareil projet, nous devions faire la
démonstration que l'hypothèse du cratère météoritique tenait la route."
La
découverte de cratères météoritiques et la datation de ces structures
revêtent un grand intérêt pour les scientifiques parce qu'elles
permettent d'expliquer des fluctuations dans les climats du passé. "Un
météorite comme celui qui a formé le cratère près de Sept-Îles met en
suspension d'énormes quantités de poussières qui peuvent perturber, pendant des années, les conditions climatiques à l'échelle continentale."
L'étude qui paraît dans Meteoritics and Planetary Science est signée par Patrick Lajeunesse (Géographie) et Jacques Locat (Géologie et génie géologique), de l'Université Laval, Guillaume St-Onge, de l'UQAR, Mathieu J. Duchesne, de la Commission géologique du Canada, Michael Higgins, de l'UQAC, Richard Sanfaçon, du Service hydrographique du Canada, et Joseph Ortiz, de l'Université Kent State. "
« Il y a des espèces de gouttes qui indiquent clairement la fusion d'un minéral, a expliqué Guillaume St-Onge de l'Institut des sciences de la mer à Rimouski. Ça prend des températures extrêmement élevées pour créer ce genre de fusion. On ne retrouve pas ces températures dans la formation de roche sédimentaire normale.»
Le
cratère est bien conservé, et bien qu'il soit situé sous l'eau, il est
relativement accessible. La découverte intéresse les scientifiques de
partout dans le monde.« Ils sont très intéressés puisqu'ils le trouvent
petit en taille pour avoir des anneaux concentriques et un dôme surélevé
au centre, a ajouté Guillaume St-Onge. Ça laisse présager de belles collaborations futures. Ces collaborations seront importantes pour aller forer directement dans la structure. »
En effet, le
prélèvement d'autres échantillons de roches au cours des prochaines
années permettra de dater de façon précise la formation du cratère.
Mais déjà, les premières analyses permettent de rejeter une hypothèse avancée récemment par des scientifiques américains. Ils avaient associé ce cratère à une baisse importante des températures survenue il y a 12 000 ans qui a entraîné la disparition des grands mammifères d'Amérique du Nord.
Le cratère du Corossol cache donc encore beaucoup de secrets. Mais ses caractéristiques particulières et l'intérêt qu'il suscite auprès des scientifiques permettront sûrement de pousser davantage la recherche et de faire un lien entre la chute de la météorite et des changements climatiques passés. "
" Il manque encore toutefois un morceau important à ce casse-tête : un morceau de météorite. M. Lajeunesse
et son équipe n’ont pas pu en trouver parce que leur équipement ne leur
permettait pas de forer à plus de 9 mètres sous le fond marin. Or, il y
a environ 50 mètres de sédiments qui se sont accumulés au fond du cratère depuis sa formation.
Avant d’avoir trouvé cette preuve directe, dit le géologue, il faudra
parler d’un cratère météoritique au conditionnel, même s’il y a peu de
chance pour qu’il ait une autre origine. "
Yves Herbo-SFH-11-2013
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